vendredi 30 mai 2008

ELIEZER OU LA MORALE À DEUX VITESSES

Si vous avez écouté le reportage diffusé au téléjournal de Radio-Canada, le 26 mai dernier, vous vous souviendrez certainement d'Eliezer Frankfurter, ce sympathique papa hassidique de la rue Outremont.
Si, si, rappelez-vous. Il parlait un français remarquable. Dans un premier plan, on le voyait attablé avec sa ribambelle d'enfants sages et son épouse (Rachel Rosenberg, la soeur du célèbre Michael Rosenberg).


Dans un autre plan, il était l'homme pieux paisiblement plongé dans sa Torah écornée.




Et son propos exemplaire et policé, empreint de respect d'autrui, vous vous en souvenez? Il disait: « C’est sûr que s’il y a une loi qui m’interdit d’avoir une synagogue quelque part, je ne peux pas préméditer et aller dire que je vais aller contre la loi et ouvrir une synagogue. Il n’y a aucun rabbin qui vous permettra de faire ça ».

Avouez que ça fait du bien d’entendre
le beau-frère de Michael Rosenberg parler avec son cœur d'homme pur. Les médias nous rapportent tellement de ragots et de mauvaises nouvelles, sans parler qu’ils ont la détestable tendance à monter tout en épingle et de faire des Himalaya à partir de minuscules monticules de fourmilières.
Par la plus grande des coïncidences, en début de soirée, devinez qui j'ai rencontré aujourd’hui. Eh! Oui. Eliezer. Il était juste devant la synagogue des Rosenberg. Il sortait de sa Honda Odyssey noire toute rutilante.
Nous étions sur le trottoir entre voisins. Eliezer m'a reconnu tout de suite. Et pour cause. Eliezer et moi apparaissions tous les deux dans le même reportage de Radio-Canada de lundi dernier.
Il m'a fait un grand sourire d’enfant doux et j'ai pris une toute petite voix pour lui signaler qu’il venait de stationner dans la zone réservée aux résidents qui ont payé pour leur vignette de la zone 27. Eliezer s’est approché et conservant son sourire tout ce qu’il y a de plus pacifique, il a répondu du tac au tac : « Je n’ai pas la vignette, c’est vrai, mais je peux choisir de payer l’amende. » Un à zéro pour lui! Ça m'a tout de suite incité à entamer une conversation amicale que j'ai d'ailleurs filmée avec caméra bien en vue.
En lui pointant l'embâcle de véhicules qui s'était formé devant la synagogue (quatre rangées de voitures stationnées côte à côte! dont la toute nouvelle Toyota Sienna de son neveu Rosenberg Junior, alias Martin) , nous lui avons alors demandé ce qu’il pensait du comportement de son coreligionnaire de neveu. Eliezer, homme de rapprochement, s’il en est, a dit : « Pourquoi ne dialoguez-vous pas avec lui? Je suis sûr que si vous lui demandez, il va admettre que c’est un problème. Vous avez raison. C’est un problème. Je suis tout à fait d’accord. Ce n’est pas une attitude à avoir. Mais... pourquoi il agit comme ça, je ne sais pas? Il faudrait dialoguer avec lui». Si tonton Eliezer le dit, c'est que son neveu doit vraiment avoir une prédisposition au dialogue, non?
J'ai eu envie de lui dire de faire attention à ses propos, car si on l’entendait, on pourrait bien lui coller à lui aussi une mise en demeure de 100 000 $ pour antisémitisme. Je me suis plutôt contenté de lui rappeler qu’il était lui même dans l’illégalité. Sa réponse ? « C’est mon choix. Je ne dérange pas la circulation, moi.» Qu’importe, n’est-ce pas, que des citoyens aient payé leur vignette afin de pouvoir trouver un stationnement devant leur domicile. «Il trouvera ailleurs!», a-t-il ajouté tout bonnement.
Peut-on vraiment le blâmer, ce pauvre Eliezer? Il semble bien que la délinquance soit non seulement héréditaire, mais qu'elle se transmette même par alliance. Père, fils, beau-frère, neveu et oncle. Oh! la la. Sauve qui peut!
Nous avons continué à échanger sur nos sorts respectifs, puis après une quinzaine de minutes, Eliezer a dû s’excuser. Le jour tombant, il lui fallait rentrer d’urgence à la maison pour entamer le Sabbat. Nous nous sommes donné une bonne poignée de main, puis chacun est reparti dans son monde respectif, l’air de croire que l’homme venait de faire franchir un grand pas à l’humanité.

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