mercredi 29 novembre 2017

ADIDAS OUTREMONT


La semaine dernière, Adidas n’aura pas eu besoin de dépenser une fortune pour faire parler d’elle. Il a suffi qu’un gérant de boutique se contente de dire quelques mots de français pour «accommoder» les médias francophones et la Ville de Montréal avant de faire tout son «speach» dans la langue de Shakespeare.

Valérie Plante, la nouvelle mairesse de Montréal, a trouvé qu’il s’agissait d’un «manque flagrant de sensibilité». Amir Khadir a parlé d’une «absence totale de respect». Même Philippe Couillard (ce n’est pas peu dire!) a qualifié d’«inacceptables» les propos du gérant.

Le lendemain de cet incident diplomatique, rebelote! Cette fois, c’est un producteur de cannabis albertain qui présentait ses installations de Pointe-Claire avec champagne, saumon fumé et... des documents uniquement en anglais. Yes Sir!

L’accroc à la loi sur la langue de travail au Québec est flagrant. Ça vous étonne? Statistiques Canada constate un recul du français partout au pays. Même à Québec! Alors, imaginez à Montréal. Depuis 2011, la proportion de personnes parlant uniquement le français a diminué de 1,2 % dans la métropole.

À Outremont, on n’a pas besoin de Statistiques Canada pour le constater. Il suffit d’assister aux séances du conseil de l’arrondissement.

Il y a bien sûr le cas des ultraorthodoxes. Mais ne partons pas en peur. Dans leur cas, ça peut se comprendre. Ils sont nouveaux arrivants depuis à peine trois quarts de siècle. Et puis, il ne faut pas se le cacher. Apprendre le français pour un yiddishophone, ce n’est sûrement pas de la tarte. It’s not a piece of cake!   !טשינ סע זיא קינאה ןקעל ןייק (Kan honik-lekn is es nisht!) 

Là où ça accroche encore plus, c’est lorsque des citoyens non hassidiques se mobilisent contre les excès de vitesse sur leur rue résidentielle et qu’ils désignent un porte-parole qui s’adressera uniquement en anglais aux élus au nom du «Durocher/Hutchison Committee».

M. Michael Makhan lors de son intervention en anglais dans la salle du conseil d'arrondissement d'Outremont. En arrière plan, l'activiste Jennifer Dorner

Bien sûr, dans le cas du citoyen, il ne s’agit pas d’une question de langue de travail. Mais à ce que je sache, le français est toujours la langue officielle à Outremont. C’est sans compter que quatre élus sur cinq sont francophones et que tous comprennent la langue de Molière. Cela n’a pas empêché Mindy Pollak de répondre in english only sans se soucier le moins du monde des résidents qui étaient majoritairement francophones dans la salle du conseil. 

Il aura fallu qu’un citoyen exaspéré lance «On n’est pas à New York, ici! Pouvez-vous nous expliquer ça en français?» pour qu’on découvre, à la toute fin, que le spokesperson du Committee était tout à fait en mesure de s’exprimer en français. Et il l’a fait en quelques mots. Était-ce sa conception de l’«accommodement» à accorder à ses voisins francophones? 

Nous n’accuserons certainement pas M. Makhan d’avoir fait preuve de mépris envers ses voisins. Mais pour emprunter les mots de Valérie Plante, nous pourrions peut-être parler d’un manque de sensibilité du groupe qu'il représentait. Car si la pétition de ce committee a été organisée par des résidents à prédominance anglophone, plusieurs d’entre eux étaient tout à fait en mesure de présenter leurs doléances en français à l’hôtel de ville.

Les anglophones de Montréal et du Québec se sentent-ils si peu reconnus qu'il leur faille aussi imposer leur langue jusque dans les arrondissements francophones?

Est-ce si difficile pour ces citoyens anglophones qui vivent ici de faire l’effort d’utiliser le français dans les réunions publiques de l’arrondissement? Come on guys! Vous êtes prêts à en découdre pour défendre le droit des hassidim à préserver leurs culture insulaire et ségrégationniste et vous ne bougeriez pas le petit doigt (ou la langue!) pour respecter un tant soit peu vos chers voisins francophones?

Je lisais pas plus tard qu'hier que le journaliste Dan Bilefsky venait d’être nommé correspondant du New York Times, à Montréal. Ce reporter juif a grandi à Montréal «à une époque où les francophones revendiquaient davantage de droits et de nombreuses entreprises fuyaient vers Toronto». Il a roulé sa bosse à Londres, Prague, Paris, New York et Istanbul. Après 25 ans en dehors du Québec, il revient. Et on dit que son français serait impeccable. Il pourrait peut-être en inspirer quelques-uns chez nous! Non?
 

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